Mon premier voyage en avion

 C’était aussi la première fois que je venais en France. On est en 2007 , j’ai 13 ans et ça fait quelques temps que je prépare ce grand voyage. Je dois rejoindre mes parents qui vivent en France depuis un dizaine d’année. À L’époque, je vis chez la grande sœur de mon père chez qui je suis depuis mes 2 ans. Après des adieux douloureux, c’est avec le cœur serré et des nœuds dans le ventre que je me rends chez une tante (Sally) éloignée avec qui je vais faire le voyage, car mes parents pensent qu’il est intéressant de profiter de son retour en France pour me faire venir avec elle.

J’arrive chez elle, elle m’installe dans le salon près de ses 2 petits garçons et m’explique qu’elle a quelques affaires à régler avant qu’on aille à l’aéroport. En attendant, je discute avec la sœur de mon père. Elle me conseille et me rassure pour le voyage. Une demie-heure plus tard, je vois arriver une jeune fille assez costaude (Malika), j’apprends qu’elle voyagera avec nous et je me mets donc à sympathiser avec elle. C’est ainsi que j’apprends qu’on a le même âge et niveau scolaire même si elle avait le physique développé d’une jeune femme.

 Le temps passe, c’est le moment de se rendre à l’aéroport. En sortant de la maison, tante Sally nous demande, d’une voix très sérieuse, de sauter un petit trou qui se trouve sur notre chemin, elle insiste pour qu’on ne marche pas dedans. Je suppose donc que ça doit être une sorte de rituel en rapport avec le voyage, et ne voulant pas faire un mauvais trajet, je prends mon plus bel élan pour sauter cet obstacle.

Arrivée à l’aéroport

On arrive à l’aéroport, je sens le stress monter en moi jusqu’à en avoir des nœuds dans le ventre et la nausée… On rentre directement dans la file d’attente pour les contrôles des passeports. Arrive mon tour, mais je trouve que le monsieur en face de moi mets du temps avant de me remettre mon passeport et de me laisser passer : il a l’air concentré sur ma photo donc je commence à avoir peur qu’il me dise quelque chose de contraignant, sachant bien qu’il y a parfois des corrompus quand il s’agit de papiers administratifs. Je commençais à m’imaginer le pire, c’est à dire qu’il dise que ce n’est pas moi sur la photo ou qu’il exige qu’on le paie pour me laisser voyager. Mais finalement il me laisse passer et je peux vous dire que c’est un grand soulagement. Ensuite mes deux petits cousins et ma tante passent puis arrive le tour de Malika. Mais je vois que le monsieur se comporte avec elle de la même manière qu’il l’a fait avec moi, il lui demande de se mettre de coté. Ma tante me confie donc les garçons et les valises en me disant de l’attendre, puis elle rejoint Malika. Je la vois discuter avec le monsieur, puis tous les 3, ils se dirigent vers les locaux de l’aéroport. Moi évidemment je ne comprends rien à ce qui se passe et j’ai de plus en plus peur. Trois quarts d’heures plus tard, ma tante nous rejoint et m’annonce qu’on fera le voyage à 4 finalement parce que Malika n’a pas le droit de voyager. Je n’ai pas eus plus d’explication que ça même si j’aurais aimé en avoir. Nous montons dans l’avion, le voyage se déroule très bien, on atterrit à l’aéroport d’Orly et ma tante m’accompagne chez mes parents, je l’entends discuter brièvement de Malika avec eux mais je ne comprends pas ce qu’ils se disent.

Découverte inattendue

Deux ans plus tard, j’apprends par ma mère que cette fameuse tante Sally est en prison car elle faisait faire des voyages illégaux depuis pas mal de temps en usurpant l’identité de ses enfants. C’est à dire qu’elle utilisait la propre identité de ses enfants, sur d’autres enfants vivant en Côte D’Ivoire qui devaient venir en France en échange de sommes colossales de la part de leurs parents. Je demande donc à ma mère si elle sait pourquoi Malika a été recalée à l’aéroport, elle me réponds que les contrôleurs doutaient de son identité car dans le passeport il y avait marqué qu’elle avait déjà été en France. Ils l’ont donc amené dans les locaux pour vérifier la véracité des informations dans le passeport en lui demandant le prix d’une baguette en France, question à laquelle elle n’a pas su répondre. C’est donc ainsi qu’ils ont su que le passeport qu’elle présentait n’était pas le sien.

À cette époque je ne savais pas comment interpréter la chose car concrètement si tante Sally s’est fait arrêter c’est qu’elle a fait du mal. Mais aujourd’hui avec le recul , je me dis que peut-être que grâce à elle, certains des enfants qu’elle a fait venir auront une vie meilleure ici comparée à celle qu’ils avaient ou auraient pu avoir en restant là-bas. Donc elle n’était pas forcement si mauvaise que ça.

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COULIBALY Tortcha