une expérience pas comme les autres
Mon histoire Ă moi n’est pas une histoire comme les autres, c’est mon histoire. Mon histoire s’est passĂ© dans un pays africain.
On a l’habitude de juger avant de savoir  Moi c’est pas mon cas, moi je ne juge pas sans avoir vĂ©cu l’expĂ©rience.
Ma sĹ“ur et moi, nous avions l’habitude de frĂ©quenter des Ă©coles privĂ©es. Après l’obtention de son baccalaurĂ©at, mes parents avaient pour ambition de l’envoyer Ă l’Ă©tranger pour poursuivre ses Ă©tudes. Mais avant de l’envoyer Ă l’Ă©tranger ils lui firent vivre une expĂ©rience : celle de frĂ©quenter une universitĂ© publique. Elle le fit pendant un an, malgrĂ© elle. Elle me raconta les rĂ©alitĂ©s d’une universitĂ© publique en Afrique.
Je pensais qu’elle exagĂ©rait, qu’elle ajoutait son petit grain de sel, pour que mes parents la retirent de ce cauchemar. Je la crĂ»s seulement le jour oĂą moi aussi j’eus obtenu mon baccalaurĂ©at. Alors je suis allĂ©e m’inscrire dans une fac publique mais j’avais jamais pensĂ©e que pour s’inscrire dans une universitĂ© c’Ă©tait aussi compliquĂ©. Pour moi il fallait juste fournir certains documents et payer une certaine somme Ă la scolaritĂ©. C’Ă©tait Ă peu prĂ©s ça mais il y avait des Ă©tapes pas possible Ă suivre avec l’anarchie qui rĂ©gnait dans ma facultĂ© mais c’est plus tard que j’ai su que c’était le mĂŞme dĂ©sordre dans toutes les facs publiques.
Il n’y avait pas d’organisation. Tu n’Ă©tais pas convoquĂ© pour t’inscrire, mais la seule chose que tu pouvais savoir c’est que les inscriptions s’ouvraient sur une pĂ©riode donnĂ©e. Ce dĂ©lai dĂ©passĂ©, tu attendais l’annĂ©e prochaine. Mais durant cette pĂ©riode c’est toi qui choisi le jour de ton passage Ă la fac pour t’inscrire. Alors ma camarade et moi, nous avions choisi un mercredi matin pour s’inscrire. On Ă©tait très enthousiastes car on pensait ĂŞtre les premières servies comme le dit si bien le proverbe « premier arrivĂ© premier servi ».
On Ă©tait Ă l’heure ce jour-lĂ , mais les personnes chargĂ©es de l’inscription Ă©taient elles très en retard et prenaient des pauses toutes les demie-heures. On aurait dit qu’ils ne voulaient pas travailler. Pourtant Ă la fin du mois ils touchent normalement leur salaire alors qu’ils ne font rien de bon.
Il y avait un second problème : la corruption. EngendrĂ©e par certains leaders Ă©tudiants de la fac qui empochaient de l’argent. En contre-partie, ils inscrivaient les Ă©tudiants paresseux qui se dispensaient de faire la queue comme tout le monde et une fois encore cela montre Ă quel point l’argent est au centre de nos vies et a le pouvoir de faire changer beaucoup de choses.
Nous, nous Ă©tions lĂ malgrĂ© l’effort que nous avions fait la veille. Ma copine et moi n’avions pas trop payĂ© car on avançait Ă peine avec tous ce dĂ©sordre. Imaginez-nous une seconde. Nous étions arrĂŞtĂ©es en plein soleil et ceux chargĂ©s de l’inscription n’en avaient rien Ă faire.
Et rajoutez Ă cela les syndicats Ă©tudiants qui se croient tout permis car ce sont eux qui sont Ă l’origine du non avancement de la queue. Oui parce qu’avec leurs magouilles ils introduisent Ă chaque fois une nouvelle personne au sein de cette fameuse queue qui parait interminable. Beaucoup de personnes ont manifestĂ© leur dĂ©saccord face Ă cette pratique. Sans suite. Ils ne pouvaient que parler car ils parlaient dans le vide… Car après l’administration c’est le syndicat Ă©tudiant et certains syndicats ont parfois plus d’autoritĂ©s que le corps personnel de l’administration s’ils dĂ©cident de mettre fin Ă l’inscription, ils le peuvent. Mais ce jour-lĂ , ils ne sont pas allĂ©s jusque lĂ mĂŞme si il y a eu certaines confrontations avec les nouveaux bacheliers qui comprirent très vite Ă qui ils avaient affaire car ce n’Ă©taient pas des enfants de cĹ“ur.
Moi j’en avais assez de tout, car selon moi ces syndicats Ă©tudiants sont censĂ©s dĂ©fendre des causes communes mais c’est plutĂ´t le contraire. Eux, ils ne pensent qu’Ă se remplir leurs poches et peu importe les moyens employĂ©s pour le faire.
Durant cette fameuse journĂ©e d’inscription, j’ai commencĂ© Ă me rendre compte que j’avais grandi. J’Ă©tais dans le monde des adultes oĂą ils n’y avait plus de cadeaux. Si je veux qu’on me respecte, soit je commence Ă choisir mon camp, Ă m’allier avec ses brutes, ou bien je commence Ă m’endurcir et je choisis la seconde option. Avant cet Ă©vĂ©nement, je pensais que la vie Ă©tait rose qu’il fallait tout simplement appliquer ce que l’on t’enseigne depuis le bas âge, ĂŞtre gentil, respecter, ne pas tricher , ĂŞtre juste… Ce jour-lĂ , j’ai remis tous ces principes en cause. Pourquoi on nous les apprend si dans la vie rĂ©elle ça ne fonctionne pas ainsi et que se sont les personnes qui font le contraire qui s’en sortent ?
J’Ă©tais toujours lĂ dans cette queue de tortue, je voulais tout lâcher et repartir chez moi, mais il n’en Ă©tait pas question car ce n’est pas dans mes habitudes d’abandonner aussi facilement ! Pour finir, je suis restĂ©e, je me suis fais pleins de nouveaux amis qui me racontaient leurs calvaires, que cela faisait dĂ©jĂ une semaine qu’ils essayaient de s’inscrire. C’Ă©tait toujours le mĂŞme dĂ©sordre alors je n’’étais pas trop Ă plaindre par rapport Ă eux, je ne m’attendais plus Ă grand chose pour le reste de la journĂ©e. MalgrĂ© ce que je venais d’entendre je n’ai pas renoncĂ© pour autant. Il y avait une part de moi qui me disait : tu seras inscrite aujourd’hui. Et c’est ce qui arriva, bien que l’inscription venait de s’achever avec les deux personnes qui Ă©taient devant moi.
J’Ă©tais déçue. Mais soudain je vis un jeune s’approcher de moi. Au dĂ©but, je pensais que la personne voulait me draguer car les garçons de la fac, et particulièrement les syndicats Ă©tudiants, ne savent que faire ça. Vu leur pouvoir, beaucoup de jeunes filles acceptent pour bĂ©nĂ©ficier de diffĂ©rents avantages : la notoriĂ©tĂ©, l’admission en classe supĂ©rieur… Moi, je pensais qu’il s’avançait pour un truc de ce genre et je le devançaits complètement. Mais il insistait. Je pris la peine de l’Ă©couter attentivement pour savoir ce qu’il me voulait : il me confondait avec l’une de ses cousines Ă©loignĂ©es qu’il avait perdu de vue il y a de cela un bon moment.
Je lui fis savoir que je n’Ă©tais pas cette personne mais il pensait surement que je blaguais. Selon ses dires, sa fameuse cousine est du genre taquine. Moi, j’avais vite compris que c’Ă©tait un mal entendu. Mais lui, il Ă©tait toujours dans les nuages, pensant que j’Ă©tais sa Sali, alors je me suis mise Ă jouer mon rĂ´le en tant que cousine je l’ai taquinĂ© et moi aussi je lui ai demandĂ© les nouvelles de ses parents… On Ă©tait presque retombĂ© dans l’enfance lui et moi qu’il ne m’a pas demandĂ© plus sur la vie de sa cousine moi ça m’arrangeait, mais d’un cĂ´tĂ© j’Ă©tais en train d’usurper l’identitĂ© de quelqu’un d’autre malgrĂ© moi.
Alors mon nouveau cousin me dit qu’il est lui aussi un membre du syndicat Ă©tudiant et par ailleurs mon inscription allait ĂŞtre rĂ©glĂ©e. C’est ce qu’il fit et j’Ă©tais plus confiante que jamais. Pour finaliser l’inscription on devait se rendre Ă l’administration centrale oĂą travaillait une de ses tantes. Sa tante qui Ă©tait donc sensĂ©e Ă©galement ĂŞtre ma tante. Je le suivis au bureau avec mon amie. Nous arrivons tous dans ce fameux bureau de notre tante. J’Ă©tais inquiète car dans ma tĂŞte je me disais qu’elle allait se rendre compte que je n’Ă©tais pas celle que je prĂ©tendais ĂŞtre.
Mais cette dernière me prit Ă©galement pour la fameuse cousine et c’est Ă ce moment-lĂ que je rĂ©alisais Ă quel point je ressemblais Ă cette Sali pour qui ils me prenaient. Je fis la bise la tante de Sali et elle aussi demanda des nouvelles de la famille. Je fis de mĂŞme. Finalement je fus inscrite Ă cause de cet incident, moi qui n’y croyais plus.
Selon moi, la moralitĂ© de cette histoire est qu’il faut toujours garder espoir. Certes, ma journĂ©e avait mal dĂ©butĂ© avec tous les incidents auxquels je n’avais jamais Ă©tĂ© confrontĂ©e tel que la corruption, l’injustice, l’incapacitĂ© de certaines personnes Ă faire leur travail et j’en passe. Cette journĂ©e a Ă©tĂ© pleine d’Ă©motions, ça sera la journĂ©e qui m’a le plus appris sur la dure rĂ©alitĂ© de la vie. Se dire mĂŞme si la vie est dure, il y aura des choses positives, comme la mienne au moment ou je n’y croyais plus, Dieu me rĂ©servait quelque chose de bien. Je dirais gardons toujours foi et faisons toujours confiance Ă nos proches. Depuis ce jour je ne doute plus de la parole d’aucun membre de ma famille.
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SYLLA Fatou
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