Les médias nationaux face au cas Charlie Hebdo

 

    Comment être neutre quand on est parti et juge à la fois ? La position des médias reste délicate dans cette affaire. Fournir des informations et des débats d’intérêt général  reposent sur des responsabilités journalistiques.  Mais face à l’attaque contre le journal satirique Charlie Hebdo,  la sensibilité personnelle des journalistes peut entrer en jeu. Le traitement de l’information à « chaud » (immédiate), ne permet pas de posséder une vue complète et augmente le risque d’erreur et d’emballement médiatique. Le conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) s’est exprimé sur ce point en invitant « au plus grand discernement » et à une réflexion poussée à propos de leur mission d’informer.

La presse nationale : écho à la citoyenneté

     De manière générale, le maître mot était celui de la solidarité. Nombreux ont été les titres et vendeurs qui ont participé à une aide financière pour le journal satirique en lui reversant une partie des bénéfices réalisés, notamment concernant le “numéro des  survivants”. Une affichette ou un message informatif le précisait à l’entrée des site officiels de journaux et bureaux de presse. Le 8 janvier, lendemain de l’attaque, les grands quotidiens avaient habillé leur une de noir parfois agrémentée de dessins afin d’évoquer le deuil national prononcé par le président de la République. Comme par exemple, Le Monde, Libération reprenant le slogan “Nous sommes tous Charlie”, le Parisien ou L’Humanité qui ont titré “C’est la liberté qu’on assassine”.

Dans le paysage médiatique français, les contenus se sont divisés en deux catégories principales et sont liées aux pratiques  journalistiques.

La première concerne plus les journaux  quotidiens ou les chaînes d’information. L’accent a été mis sur les faits : la prise d’otage de Vincennes est vu comme un tout avec l’attentat des locaux de Charlie Hebdo et la manifestation du 11 janvier éclipsant un peu les détails sur le cas de Coulibaly. La marche qui a rassemblé près de 4 millions de français est associée aux champs lexicaux du dynamisme, de la masse et de l’Histoire (“Dimanche 11 janvier: Une marche pour l’histoire” titrait Le Monde, “mobilisation historique” terme utilisé par I-télé, “le plus gros rassemblement depuis la libération” affirmait L’Obs). Les médias ont encouragé les individus à s’exprimer sur un panel de sujet. Suite à des témoignages en micro-trottoir de personnes venues par solidarité, qui ne veulent pas d’amalgames ou qui veulent défendre le droit sur l’expression. Les médias ont fait ressortir les valeurs  de la liberté et de la fraternité et on fait de cette mobilisation une expression républicaine de l’opinion public.

Très rapidement, les organes de presse ont procédé à des rappels historiques sur la liberté d’expression, sur la publication de caricatures et du cas de Charlie Hebdo et à des reconstitutions des actes criminels. Au moment, de la recherche des suspects et des prises d’otages, les chaînes d’information ont majoritairement invités sur leur plateau des membres des forces d’inventions (GIGN et gendarmerie). Ici, il s’agit bien d’éviter la paranoïa généralisée de l’audience grâce à la qualité des renseignements et la légitimité statutaire des intervenants. Leur présence sert aussi à répondre à la question que beaucoup se posent: comment cela a-t-il pu se produire si les terroristes étaient déjà connus des services de sécurité ?

Le terroriste Coulibaly a réussi à entrer en contact en direct avec BFMTV (vers 15 h environ). C’est à celle-ci et à I-Télé qu’une femme d’un des otages cachés reprochera par la suite d’avoir mis en danger les otages en divulguant leur position. BFMTV se défend en affirmant qu’ils n’en ont parlé qu’après l’intervention des forces de l’ordre, une fois les otages hors de danger. Ce cas est évoqué par le droit français qui, pour des raisons de sécurité nationale, peut restreindre la liberté d’expression. Canal+ consacre sont Grand Journal et son Petit Journal aux événements récents. La voix est donnée aussi à ceux qui ne se rassemblent pas sous la bannière commune : le journal le Monde soumet publiquement un article intitulé “Il faut écouter ceux qui disent “Je ne suis pas Charlie” publié le 13 janvier.

L’espace publique s’ouvre sur des débats au sujet de l’unicité citoyenne, la défense nationale, la liberté de la presse et la laïcité.

La deuxième catégorie incarnée par les médias souvent à parution plus étendue, comme les hebdomadaires ou mensuels, que l’on dit issu d’une tradition d’investigation et de critiques, prennent eux plus de recul. Ils évoquent les risques d’amalgames entre l’islam et le terrorisme, le traitements médiatique qui doit respecter les règles déontologiques du journalisme, les débordements et  le risque que certains acteurs reprennent les événements à leur avantages notamment des politiciens. 

Lou Magloire

Alexandra Kofi

Mariama Kaba

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